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samedi 23 novembre

Deyvillers et alentours – La Grande Guerre vécue par Maurice Bedel tweetée au jour le jour

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Maurice Bedel

« Il pleut. Dès le petit matin le troupeau des émigrés commence d’affluer. Il y en a qui viennent de Saint-Dié. La plupart arrivent des environs de Rambervillers : c’est toujours le même monde : des enfants, des jeunes filles, des femmes, des vieillards. Il y en a qui paraissent aisés : ils vont dans la boue, comme les autres, leur valise à la main. Sur la paille d’une charrette un vieillard de 87 ans est en délire : « Bandits… Cochons… Cochons… ! » Il semble être soudain à toute extrémité : sa femme agenouillée près de lui l’abrite sous un vieux parapluie vert. Je le fais transporter à l’infirmerie : on le couche, on lui donne un grog, dans un coin, sa fille crie et vomit. […]

Deyvillers s’organise pour la défense : à différents endroits des digues ont fait déborder le ruisseau. Dans Saint-Olger, les arbres sont abattus, les maisons crénelées. Je ne parle pas des tranchées, ni des fils de fer, ni des abattis, il y en a partout. Epinal est entouré d’un réseau de fils de fer, de piquets, de tranchées et de créneaux.

 

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Un autobus passe chargé de prisonniers allemands que gardent gendarmes et douaniers. Puis de temps à autre un soldat isolé, presque toujours du 13ème corps : chasseurs à cheval, fantassins, cyclistes.

A Epinal j’ai trouvé la ville encombrée d’émigrés, de traînards, de convois. Les hôpitaux commencent à s’emplir : les lèvres blanches des draps avalent leurs proies douloureuses. A Saint-Joseph Renée Voisin est surmenée : je la vois trottiner toute blanche au milieu des linges rougis, elle console solidement les blessés, non par des paroles insignifiantes et fades mais à la militaire. Dans chaque dortoir se trouve un prêtre-infirmier. Plaies énormes : bras emportés, dos hachés, crânes scalpés ; de tout cet amas blanc et rouge s’élèvent des gémissements. Il y en a qui pleurent comme des enfants. J’en entends un qui gémit : « Ma Maman, ma Maman !… » De sa tête on ne voit parmi les linges que deux lèvres exsangues.

Sur la route, au retour, je rencontre un long, long convoi d’émigrés : en tête marchent les vieilles femmes et les estropiés : les autres règlent sur eux l’allure de leur marche. Ensuite viennent les charrettes, généralement traînées par deux vaches et débordantes de jambes balancées et de bras pendants »

Maurice Bedel

Maurice Bedel (1883-1954) a durant quatre années relaté au quotidien la Grande Guerre comme il l’a vécue dans son «Journal de guerre», publié en 2013  par la Châtelleraudaise Chantal Verdon chez Tallandier.

Depuis le 1 er  août, les écrits du médecin, écrivain et futur prix Goncourt en 1927, sont publiés sur un blog hébergé sur le site de La Nouvelle République (http://goo.gl/0nB7Vm), une page Facebook et un compte Twitter (@Bedel2014).

Chaque article parait au jour le jour, nous faisant vivre « en live » cent ans plus tard, la Grande Guerre telle qu’il l’a vécue sur le front des Vosges, de l’Aisne ou dans l’Atlas marocain.

De nombreux articles concernent donc notre département, comme en ce 27 août 1944 à Deyvillers où il se trouve depuis le début de la guerre :

Article à retrouver sur le blog dédié

Épinal Infos


Accéder à l’intégralité de l’édition Épinal Infos

Deyvillers

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Grande Guerre

Maurice Bedel

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