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jeudi 19 septembre

Surirradiés d’Epinal: erreurs, dissimulations et comportement déviant dénoncés

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Source  AFP.

Erreurs, dossiers « nettoyés », « sous-estimations notables », « absence d’information et même désinformation » sur fond « d’usage déviant du secteur privé » à l’hôpital: une enquêtrice a dressé jeudi un tableau accablant du pire accident de radiothérapie enregistré en France au procès des surirradiés d’Epinal.

Jean-Francois Sztermer et son avocat Hervé Temime à leur arrivée le 24 septembre 2012 au palais de justice de Paris (Photo Mehdi Fedouach. AFP)

Françoise Lalande, de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), a enquêté sur le premier accident enregistré, qui a affecté 24 patients, les plus gravement touchés. Avec un deuxième dysfonctionnement séparé découvert ensuite, le nombre de victimes approche les 450. Douze sont mortes.

Devant la cour d’appel qui rejuge Joshua Anah, 57 ans, radiophysicien, et deux médecins radiothérapeutes, Jean-François Sztermer, 66 ans, et Michel Aubertel, 64 ans, condamnés en première instance à 18 mois de prison, le docteur Lalande retrace ses découvertes après que des patients traités pour des cancers de la prostate eurent développé de graves séquelles liées à des surdosages de radiothérapie.

Tout d’abord, il y a ces « dossiers qui semblaient avoir été nettoyés » et l’ont obligée à « tirer la pelote » en contactant elle-même les patients.

Puis la découverte qu’une procédure de soins avait été modifiée par M. Anah, en l’absence des chefs du service. Et que sur sept manipulateurs, qui administrent les traitements, quatre avaient été mal formés et reproduisaient une même erreur conduisant à des surdosages massifs (20% au dessus du maximum), de mai 2004 à août 2005.

Or la zone est ultra-sensible, « il faut éviter la vessie et le rectum et la frontière entre dose thérapeutique et dose toxique est très ténue ». Enfin, l’enquêtrice découvre « un usage excessif des images de contrôle, sans tenir compte de la dose de rayonnements supplémentaire » (c’est le deuxième dysfonctionnement).

A ces erreurs techniques, s’ajoute un suivi de l’accident « déficient ». Alors que « les symptômes sont apparus assez vite » chez plusieurs patients, on ne les rappelle pas tous, les médecins traitants ne sont pas alertés.

– ‘Retards et errements’ –

« Une absence d’information, ou même une désinformation, qui a empêché la prise en charge », pire, qui a parfois conduit à des erreurs de diagnostic aux conséquences dramatiques. Plusieurs médecins traitants ont ainsi prescrit des biopsies à des surirradiés, examen alors totalement contre-indiqué car pouvant causer des fistules.

« Des comportements fautifs qui ont entraîné retards et errements », résume sèchement l’enquêtrice. Et pourquoi? « La peur pour leur réputation et surtout la crainte d’une perte de revenus ».

Et de décrire un « usage déviant du secteur privé » au sein d’un hôpital public où les praticiens peuvent exercer en libéral, mais « pas plus de 20% de leur temps de travail » et sans sélectionner les malades.

Elle déroule les statistiques implacables du service de radiothérapie d’Epinal. 13% du temps en libéral pour le docteur Aubertel et 15% pour le docteur Sztermer. Ils sont dans les clous… en durée. Mais en valeur, c’est 32% de leurs actes, traduction d’un « écrémage » des patients. Et sur 250 traités pour cancer de la prostate de 2004 à 2006, 75% sont en secteur privé.

Les « cotations » de la Sécu, particulièrement avantageuses, « permettaient de doubler le prix des traitements. Malgré la redevance de 60% reversée à l’hôpital, cela pouvait représenter un supplément de revenu de 160.000 euros par an ».

Face à la charge, la défense joue chacun pour soi. Pour le radiophysicien, son avocat invoque des problèmes d’ »assurance qualité », comme dans 75% des services de radiothérapie en France. La défense d’Aubertel charge au contraire le radiophysicien. Celle de son collègue, qui a moins de patients dans ce groupe, juge que « la gravité des faits n’est pas la même » pour les deux médecins.

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