Les commerces de proximité : tous essentiels, bons élèves du protocole sanitaire… Et malgré tout sacrifiés.
La crise sanitaire que nous vivons est indéniable. La nier serait à la fois stupide, irresponsable et particulièrement irrespectueux envers les centaines de milliers de ses victimes en France et dans le Monde et leurs familles. Durant plusieurs mois, les différents protocoles sanitaires en vigueur sur l’ensemble du territoire national avaient semblé permettre de contenir l’épidémie et ainsi rendre à nos concitoyens un semblant de vie normale. Il n’en était rien ! Les chiffres sont là, les morts aussi, et nos services de santé s’attendent à être saturés d’ici peu. Il était donc nécessaire que les pouvoirs publics prennent des mesures fortes afin d’endiguer ce fléau qui peut toucher chacun d’entre nous, nos proches, nos collaborateurs, nos clients…
Nous sommes désormais entrés dans le « Confinement version 2 ». Les mesures de confinement ont été assouplies, mais soulèvent néanmoins de réelles questions. Si la préoccupation sanitaire reste prioritaire, d’autres facteurs, non moins importants pour notre société, semblent entrer en considération dans les décisions actées par l’exécutif. Prenant en compte l’intérêt de l’enfant, l’aspect social et éducatif : écoles, collèges et lycées, alors qu’ils sont naturellement des lieux de propagation du virus au sein de leur jeune public (souvent porteur sain et peu accommodé à la distanciation physique) sont maintenus en activité. De même, les transports en commun, nécessaires à la continuité d’un minimum d’activité dans notre pays, sont également actifs. Dans ces deux cas, les facteurs sociaux, sociétaux et économiques sont donc intervenus dans les décisions prises par le Gouvernement. Et si l’activité économique et sociale est clairement prise en compte, ne sommes-nous pas, nous commerçants, essentiels au maintien de l’activité de notre pays ?
Bons élèves reconnus du protocole sanitaire lors du premier déconfinement, les commerces ont été soumis à une attention toute particulière et ont veillé scrupuleusement au respect des réglementations qui ne manquaient pas d’évoluer. Nécessitant des investissements parfois lourds pour certaines structures (achats de masques, de gel HA, de parois plexiglas, …), les protocoles sanitaires successifs ont aussi, par leur incompréhension et leur rigueur dans nos établissements en particulier, généré des tensions avec une partie de nos clientèles qui ne souhaitait pas s’y soumettre ou ne les comprenait pas. Nous sommes pourtant resté garants de leur respect, en appliquant à la lettre ces directives qui conditionnaient le maintien de notre activité. Coûte que coûte, refusant des ventes, refusant l’égoïsme et le manque de responsabilité de certains, usant de pédagogie et de patience, nous sommes restés fermes. A Gérardmer et au sein de l’association des commerçants et artisans que je préside, je peux affirmer que, pour la grande majorité d’entre nous, nous avons été exemplaires quant au respect de ces mesures : distanciation physique, gel HA, port du masque, limitation du nombre de clients (4m² par personne) et affichages correspondant. Nous avons par ailleurs été régulièrement contrôlés par la Gendarmerie (2 à 3 fois pour certains commerces). Ainsi, Gérardmer Animation réaffirme avec fermeté que tout aura été mis en oeuvre afin de préserver la santé des clients et de nos collaborateurs.
Pour autant, le couperet est tombé sur nos établissements: nous sommes dangereux et non-essentiels : rentrez chez vous, on ferme !
C’est un choc pour un grand nombre des professionnels indépendants, d’autant plus que la période s’annonçait des plus importantes pour leurs activités et laissait envisager enfin une certaine éclaircie sur le plan financier dans cette année très difficile. Il est désormais acquis que la saison de Noël est largement amputée pour de nombreuses activités qui réalisent une grande part de leur chiffre d’affaire à cette période. C’est un choc aussi pour nos collaborateurs qui sont parfaitement au fait des réalités de la gestion d’une entreprise et qui sont donc très inquiets pour les mois à venir. Je rappelle ici que Gérardmer Animation c’est 151 commerces adhérents et 840 emplois. A l’heure actuelle, je ne suis pas certain de pouvoir annoncer les mêmes chiffres d’ici quelques mois !
Au travers des choix opérés se posent ainsi deux questions principales :
– Sur l’aspect sanitaire : est-il bien cohérent de ‘confiner’ la population et de fermer des établissements qui accueillent quelques dizaines de clients par jour (petits commerces, bars, restaurants,…) et qui respectent scrupuleusement les règles, tout en maintenant ouverts d’autres qui voient s’agglutiner des centaines de personnes de manière permanente avec un respect moindre des gestes barrière. Les petits commerçants, bons élèves des protocoles sanitaires vivent un sentiment d’injustice.
– Sur l’aspect économique et social : ces mesures font porter un risque majeur sur l’ensemble des petits indépendants et leurs collaborateurs, déjà fragilisés par le premier confinement. Pour passer le cap du Printemps, les entreprises se sont surendettées (250 prêts bancaires contractés sur Gérardmer !) et devront rembourser à la sortie de l’hiver, elles n’ont donc plus de marge de manoeuvre ! Quant à la distorsion de concurrence ainsi créée, notamment au bénéficie de plateformes de vente en ligne à l’approche de Noël, elle est vécue comme une trahison, celles-ci n’étant pour leur part que très peu contributrices à l’économie et la fiscalité locale.
Aujourd’hui, les petits commerçants, les indépendants de centre-ville que nous sommes, sont abandonnés, sacrifiés. Ceci est parfaitement injuste, injustifiable sur le plan sanitaire, incohérent en comparaison à d’autres secteurs de la société et dramatique sur le plan économique et social.
Nous ne sommes pas délocalisables, nous sommes corvéables à merci, ponctionnables toute l’année, imposables à souhait… Il est peut-être temps que nous soyons, comme tout un chacun, considérés et soutenus de la seule manière qui soit : nous laisser travailler, nous laisser créer de l’emploi, de l’investissement et du lien social toute en protégeant nos collaborateurs et nos clients comme nous avons montré que nous étions capables de le faire.
En mars dernier, le Président de la République a refusé de confiner exclusivement les personnes à risques, projet considéré comme discriminatoire au regard de la loi française. Qu’en est-t-il aujourd’hui de la discrimination et la distorsion de concurrence dont nous sommes désormais victimes de par ce confinement et la fermeture de nos établissements ?
Nous avons sur ces questions, interpellé nos élus locaux et parlementaires, ainsi que les services de l’Etat, et nous espérons pouvoir prochainement vous informer des effets concrets de leurs actions respectives.
Le Président de « Gérardmer Animation »,
Nicolas RUMEAU
0 commentaire