Le 18 février dernier, l’ADEMAT a envoyé une lettre à Christophe Lannelongue, directeur général de l’Agence Régionale de Santé Grand-Est. Celle-ci reste sans réponse.
« Monsieur le Directeur de l’ARS Grand Est,
L’Ademat-h souhaite pouvoir reprendre contact avec vous et avec vos services. Comme nous vous l’indiquions dans notre courrier du 28 décembre dernier, dans lequel nous souhaitions pouvoir échanger avec vous à propos du contenu du plan de performance proposé aux hôpitaux de Remiremont et d’Epinal, nous nous interrogions plus précisément sur le devenir de l’établissement hospitalier romarimontain. Nous avons été reçus le 22 janvier au siège de la délégation territoriale de l’ARS pour les Vosges à EPINAL, quelques jours avant la date prévue pour la signature du dit contrat de performance. Nous avons pu faire le constat que la procédure engagée n’avait fait l’objet d’aucune étude d’impact. Plus, elle est d’ores et déjà mise en œuvre par anticipation par la direction des hôpitaux en dépit des mises en garde, des interrogations et des oppositions massives des instances, Elle n’a pas davantage respecté les nécessaires phases de concertation et d’information des populations et de leurs élus.
Le projet ne fait, selon nous, aucunement démonstration de sa pertinence au regard des objectifs affichés deréduire des déficits, dont nous savons par avance et par expérience, qu’ils sont d’abord le résultat du mode de financement à l’acte des hôpitaux (T2 A) et de la fixation des objectifs annuels de l’assurance maladie (ONDAM). Surtout nous ne trouvons aucun élément de contextualisation des mesures préconisées au regard d’objectifs partagés de santé publique et de spécification contextuelle d’un territoire de moyenne montagne.
Remiremont, comme vous ne pouvez l’ignorer, est le point de convergence des multiples vallées desservant Gérardmer, La Bresse et Bussang pour les Vosges, Luxeuil et Faucogney pour la Haute-Saône. Or ce bassin de vie et d’habitat dispersé a des besoins spécifiques (plus de 100 000 habitants concernés avec un peuplement supplémentaire de résidents temporaires toutes saisons) ; les indicateurs de santé et de mortalité sont préoccupants par rapport à la moyenne nationale, sans qu’ils puissent tous être attribués au vieillissement important de la population.
Enfin ce plan de performance, essentiellement comptable et destructeur des moyens et services mobilisés localement, ne fait ni état des conséquences pour l’emploi direct et induit, ni d’une analyse projective sur la démographie scolaire et plus globalement sur l’attractivité d’un territoire déjà très impacté par les fermetures d’entreprises petites et moyennes.
Si l’hôpital est généralement l’un des plus gros employeurs d’une collectivité remplissant les fonctions de centralité pour son bassin de vie, vous ne pouvez ignorer qu’il est un véritable poumon qui donne de l’air au territoire. Tout déplacement de personnels, toute fermeture de service, directe ou progressive, contribuera à accélérer un processus de mort annoncée, qui ne concernera pas que l’établissement et ses personnels.
C’est pourquoi notre association a exprimé clairement le souhait que le dossier soit repris sur de nouvelles
bases reprenant non seulement les conclusions de l’audit interne réalisé par Ernst et Young mais également un diagnostic partagé des besoins de santé du territoire. Il nous faut travailler ensemble avec les acteurs locaux, les élus, les associations, les organisations syndicales interprofessionnelles, les personnels de santé des hôpitaux et établissements et les libéraux et avec votre administration pour construire un véritable contrat territorial de santé qui fixera des objectifs avant de préciser les moyens à mobiliser pour les réaliser. Si le travail n’est pas repris dans cet esprit et cet objectif, nous risquons d’aggraver encore une situation déjà alarmante et accentuer les difficultés de l’ensemble des territoires vosgiens et pas seulement du bassin romarimontain.
Nous aimerions pouvoir attirer votre attention, monsieur le directeur régional, sur nos intentions. Elles ne sont pas strictement défensives mais résolument tournées vers la construction du futur de nos territoires dans la complémentarité et non la fusion et encore moins la confusion. Nous incarnons une ambition forte : celle de renforcer le bien être des vosgiens et la qualité de vie qui fait la marque du Vivre en Vosges. Il y va du devenir d’une économie de montagne qui allie tradition et diversité, services de qualité et produits d’un tourisme renommé et raisonnable. La santé est un marqueur fort au même titre que tous les autres volets de l’économie locale qui ne refusent pas les évolutions à condition qu’elles soient sources d’un mieux vivre et non d’une dégradation du cadre de vie.
L’évolution de l’hôpital doit pouvoir s’inscrire dans cette ambition nouvelle pour donner du souffle à un projet de territoire fédérateur et porteur de sens, capable de renforcer la cohésion sociale et territoriale. Elle ne peut, elle ne doit pas contribuer à faire peser une menace récurrente sur les populations et sur l’économie locale. Surtout elle ne doit pas provoquer de risques supplémentaires pour la santé des vosgiens et de leurs voisins de Haute-Saône, ni ajouter de la désespérance dans des territoires qui se sentent abandonnés par l’Etat. La période actuelle est à cet égard riche d’enseignements; il est urgent de construire l’avenir en rassurant sur le maintien des services publics dans les territoires ruraux. L’hôpital n’échappe pas à cette exigence.
Nous vous avions alerté dans notre dernier courrier en vous demandant de ne pas ajouter de la colère à la
colère. Les évènements qui se sont déroulés au siège de la délégation territoriale ARS à Epinal le 25 janvier
dernier ont démontré la détermination des uns et des autres. Nous aurions souhaité que les voix du dialogue soient les plus fortes. Nous ne souhaitions pas vous mettre en difficulté mais les syndicats comme nos adhérents ne peuvent plus admettre de devoir se satisfaire de beaux discours qui masquent des réalités
concrètes qui affectent dramatiquement des équilibres fragiles.
Nous aimerions pouvoir reprendre le dialogue rapidement sur de meilleures bases et nous espérons pouvoir rapidement participer à une vraie table ronde associant tous les acteurs concernés pour définir un cadre commun de travail, décloisonné et constructif, avec un double objectif : définir sur la base d’un diagnostic partagé un contrat territorial de santé ambitieux. La place des établissements hospitaliers généraux y sera réaffirmée et confortée avec de nécessaires complémentarités mais aussi avec une ouverture territoriale plus grande. Cela devrait contribuer à redonner de l’attractivité et permettre d’attirer des praticiens dont les établissements ont besoin en complémentarité de la médecine de ville.
Dans l’attente de la réouverture d’un dialogue apaisé et constructif, je reste à votre disposition pour participer dans cet esprit à l’élaboration d’une méthode et d’un calendrier de travail associant les élus, l’administration, les forces vives du territoire, les associations, les représentants des personnels et des instances hospitalières, des professionnels de santé et des organisations afférentes.
Je vous prie de croire, Monsieur le Directeur Régional, à l’attachement de notre association à rechercher des solutions acceptables et à l’assurance de ma meilleure considération.
Pour l’Ademat-h, le président,
Jean PIERREL »
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